La Convention citoyenne pour le climat (CCC), initiative unique en son genre, a réuni 150 citoyen·nes afin de formuler des propositions concrètes pour permettre à la France de respecter ses engagements en matière de réduction des gaz à effet de serre. Cependant, malgré l'ambition et la diversité des propositions, le gouvernement a reçu une note médiocre de 3,3/10 pour sa prise en compte des suggestions issues de la CCC. Lors du premier vote de la loi Climat et résilience à l'Assemblée nationale le 4 mai, seulement environ 10 % des mesures proposées par la Convention ont été reprises.
Des Propositions Écologistes Inappliquées
Les associations écologistes ont exprimé leur frustration face à la loi qui, selon elles, manque cruellement de mécanismes d’obligation en matière de rénovation énergétique. Alors que les politiques incitatives se sont révélées inefficaces, la loi ne propose aucune obligation stricte de rénovation. En outre, la présence de nombreuses exceptions à la définition d’une rénovation énergétique performante risque de dilapider l'argent public sans atteindre les objectifs fixés.
Pour qu'une rénovation soit considérée comme performante, elle doit normalement permettre d'atteindre un niveau de performance énergétique A ou B, tout en traitant les six postes de travaux essentiels : isolation des murs, isolation des planchers bas, isolation de la toiture, remplacement des menuiseries extérieures, ventilation, et production de chauffage et d’eau chaude sanitaire. Cependant, les exceptions présentes dans la loi affaiblissent cette définition.
Les Failles de la Loi Climat
En vertu de certaines contraintes, une amélioration de seulement deux classes énergétiques et le traitement des six postes de travaux suffisent à considérer une rénovation comme performante. Pour les logements classés F et G (les « passoires énergétiques »), une rénovation atteignant la classe C avec prise en compte des six postes de travaux est également jugée suffisante.
La loi Climat interdit la location de certains logements non rénovés à partir de dates spécifiques, mais cette interdiction sans obligation de rénovation pèse lourdement sur les locataires. Ceux-ci continuent de souffrir des mauvaises conditions énergétiques, tandis que les propriétaires, n'ayant pas réalisé les travaux nécessaires, se posent en victimes face aux interdictions de location.
Depuis l’adoption de la « Loi Climat et Résilience » en 2021, le gouvernement a cependant fait marche arrière en retirant une grande partie des logements classés G de l’interdiction de location. Guillaume Kasbarian, le nouveau ministre du logement, a annoncé que 140 000 passoires thermiques pourraient de nouveau être louées si elles sont de petite taille.
Les Justifications du Gouvernement et les Critiques
Pour justifier ce retour en arrière, le ministère du logement évoque des rectifications dans le calcul du Diagnostic de Performance Énergétique (DPE), jugé jusqu'ici « biaisé ». Toutefois, ces ajustements semblent répondre davantage aux pressions des lobbies immobiliers et des propriétaires fonciers qu'à une véritable correction d'injustice. L'Union de la Propriété Bâtie de France (UNPI) et la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) avaient dès 2021 qualifié le nouveau DPE « d’accident industriel » et demandé la révision du calendrier des objectifs.
Contrairement aux affirmations du gouvernement, le DPE est généralement plus élevé pour les petites surfaces non pas à cause d’un biais, mais parce que ces logements sont souvent mal isolés. Selon Isolde Devalière, de l'Observatoire national de la précarité énergétique, la concentration de petites surfaces dans certaines villes est souvent le résultat de découpages d'appartements en petits lots par les propriétaires.
Conclusion : Un Pas en Avant, Deux Pas en Arrière
Après seulement quelques mois d’interdiction, ces mesures permettent aux propriétaires de remettre sur le marché des milliers de passoires thermiques sans les avoir rénovées, perpétuant ainsi le gaspillage énergétique. La note de la CCC de 3,3/10 reflète l'insatisfaction face à une action gouvernementale perçue comme insuffisante et souvent contre-productive. Pour atteindre les objectifs de rénovation énergétique et de neutralité carbone d'ici 2050, des mesures plus rigoureuses et contraignantes sont nécessaires, avec une réelle volonté politique de les appliquer.